ÉDITION : NOIR D'ABSINTHE. 248 PAGES. Pour être tout à fait honnête, je m’attendais à une lecture de type humoristique. Une chick-lit mélangée à du fantastique, à de la revisite de conte. En réalité, c’est tout autre, puisque l’histoire se montre globalement triste. Marraine d’Emilie Chevallier Moreux narre l’histoire d’un personnage récurrent dans les contes, mais sur qui personne ne s’attarde jamais en général. Je trouvais l’idée originale, et je ne me suis pas trompée. En ce qui me concerne, ce récit frôle de près le coup de cœur ! Ce roman été lu en lecture commune avec Ivre de Mots (La tasse ébréchée a dû tracer sans nous, sniiif). Résumé : Il était une fois, une bonne fée qui se penchait sur le berceau des nouveau-nés afin de les inonder de bienfaits pour les siècles des siècles. Et comme le dirait si bien Ric, l’un de ses petits protégés : trop bonne, trop conne ! Mais quelle mouche a piqué Marraine Perrault pour qu’elle prenne pareils filleuls sous son aile ? Entre Peau d’Âne la mère maquerelle, Aurore la top-modèle siliconée, Cendrillon la veuve noire et Riquet l’alcoolique notoire, on ne peut pas dire que l’affaire soit une réussite. Pour couronner le tout, ses pupilles risquent fort de se dresser entre elle et ce bellâtre slave qui lui est – littéralement – tombé dessus dans un centre commercial new-yorkais. Parviendra-t-elle à se débarrasser de ces obligations qui l’accablent depuis si longtemps pour enfin trouver chaussure à son pied ? Pas si facile, quand on fait un petit 36… Mon avis : Le scénario se divise en deux. D’un côté, nous avons l’aspect mi-contemporain, mi-fantastique situé dans le présent. De l’autre, des souvenirs de Marraine (ou devrais-je dire Lilas), de sa vie d’antan, où ça fait davantage « ancien », proche des contes originaux, malgré des changements effectués pour convenir à la revisite subtile de l’autrice. D’ailleurs, j’ai découvert les contes de Peau d’Âne et Ric par le biais de ce roman, ce qui est vraiment intéressant. Après avoir fini Marraine, je suis donc allée me renseigner sur les contes originaux, afin de comparer les chemins pris, les fins… Vraiment, c’était enrichissant. L’autrice a modifié de petits détails qui ont changé totalement la donne ; le battement d’ailes d’un papillon qui provoque un ouragan plus tard. Pour le coup, j’ai trouvé les embranchements bien ficelés, que cela soit entre le présent et la réalité, mais aussi entre les différents personnages. Tout a un sens, tout a une explication. Et, bien entendu, tout se dénoue à la fin, sinon ce n’est pas drôle. Aussi, j’ai été subjuguée par les émotions que transmet l’autrice. Elle parvient, sans difficulté, à nous placer dans cette histoire où tout le monde a sa place, où chaque pièce complète un puzzle de prime abord complexe mais, au final, assez logique. Je salue la maîtrise d’Emilie Chevallier Moreux d’avoir pu jouer ainsi à sa guise avec trois contes variés, l’élément qui les attachait les uns aux autres et de changer de moindres détails, provoquant ainsi une escalade de conséquences cohérentes. Le seul point qui m’a légèrement déplu est l’ajout de romance dans l’histoire. Je ne verrais plus l’intrigue sans ça, maintenant, c’est clair. Mais n’étant pas fort fan de ce type d’histoire, de base, c’est le seul point qui me dérange, et c’est complètement subjectif. Par contre, le roman traite de sujets durs comme l’alcoolisme, l’inceste, la mauvaise estime de soi, et j’en passe. De manière élaborée, l’autrice parle de ces thèmes avec maturité, assombrissant ainsi davantage son intrigue. Cela m’a surprise, car comme je vous le disais, je m’attendais à quelque chose de plus drôle. Néanmoins, j’ai adoré cette teinte dramatique. Cela apporte un charme à l’histoire, au goût de sucre et de sel. En revanche, quelque chose de dingue, je vous le dis : c’est la plume de l’autrice. Une vraie bombe ! C’est fluide, c’est prenant, bien écrit. On entre dans le texte très facilement, on ne s’y perd pas, c’est toujours clair, sans prendre le lecteur pour un idiot. Les pages ne se lisent même pas, elles se survolent tant c’est léger et doux. On ressent une nette différence entre le passé et le présent, ces deux époques toutes deux narrées différemment. J’ai trouvé ça incroyable. C’est tellement bien manié ! Un peu comme si deux auteurs racontaient le même récit, mais avec une certaine homogénéité. Emilie Chevallier Moreux a la fibre d’une conteuse. Alors, les personnages… Globalement, ils sont tous très bien exploités. Quand je vois le conte d’origine de Peau d’Âne, je comprends ce que l’autrice a fait dans son récit. Elle s’est servie du pire trait chez chacun(e) des filleul(e)s de Marraine et elle les a accentués à l’extrême. C’est tellement ridicule, que ça en devient triste, au final. On comprend pourquoi tout le monde a viré ainsi sur le mauvais chemin. Ainsi, Emilie Chevallier Moreux explore avec Lilas le questionnement de vie que n’importe quel adulte responsable de plus jeunes pourrait avoir : qu’est-ce que j’aurais pu faire pour éviter cela ? On suit une Marraine torturée par son passé, ses choix, ses actes (ou ses non actes). Elle regrette, culpabilise, se sent en colère. Tout ce qu’elle a voulu construire a viré au cauchemar et elle ne sait pas comment arrêter la machine. Dans les pages, on sent sa détresse, son angoisse, son ras-le-bol. Elle veut vivre pour elle, comme jamais elle n’a pu le faire auparavant. On observe une chute douloureuse chez ce personnage. Une chute qui, dans tous les sens du terme, lui ouvre les yeux sur ce qu’elle veut vraiment pour son propre bien. Je trouve cette femme très authentique, bien ancrée dans ses époques. Je ne sais pas si je m’y suis identifiée, si je l’ai appréciée. Je parlerais plutôt d’attachement en mentionnant Ric, personnage très vivant et touchant à sa façon. Évidemment, j’ai détesté Peau d’Âne du début à la fin (alors que dans son conte, elle est moins tarée que ça, elle se retrouve juste dans une drôle de situation). Aurore et Cindy m’ont juste fait un peu « rire », parce que leurs situations sont ridicules, mais conformes au chemin de vie qu’elles ont pris en évoluant. Une chose est sûre, je ne verrai plus jamais la belle aux bois dormants et Cendrillon de la même façon, maintenant ! Sans spoiler, je dirais que la fin du roman convient bien à ce type d’histoire. La boucle est bouclée, de façon douce-amère, et c’est justement ce que j’ai le plus apprécié. D’ailleurs, la seconde partie du roman, je l’ai dévorée en une soirée, tant j’étais prise dedans. Une fois la moitié passée, il m’a été impossible de me stopper, alors que j’avais trouvé le début un tantinet long. Comme quoi… ! Grosso modo, Marraine est une revisite de conte 100% réussie, avec une parfaite maîtrise de l’effet papillon. Chaque personnage change de visage, nous offrant ainsi leur face la plus laide, la plus sombre, la plus… folle. Parce que de la folie, dans ce livre, il y en a (et pas qu’un peu !). Je m’attendais à une histoire humoristique et mignonne, alors qu’en réalité, elle est bien loin de tout cela. L’autrice touche, avec maturité, à des sujets durs qui enfoncent le récit dans les pires tréfonds de l’humanité. Bien que l’aspect romance m’ait un peu gênée, je dois avouer que j’ai adoré le reste. Notamment la plume de l’autrice, douce et légère, en totale adéquation avec la dualité de son univers, situé entre deux époques. Ce roman plaira aux amateurs de revisites, mais également de contes originaux. Parce qu’Emilie Chevallier Moreux ne se contente pas de chambouler les vraies histoires, tel un bourrin, sans but derrière. Non, non. De tout son cœur, elle nous plonge dans l’esprit d’un personnage souvent laissé en arrière et rend un véritable hommage aux textes dont elle s’inspire. Ce roman frôle le coup de cœur, alors il est certain que je le recommande à tous ! ♥ LIRE LA CHRONIQUE DE MA BINÔME ♥
16 Commentaires
10/2/2020 16:18:11
J'en garde un excellent souvenir.
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11/2/2020 00:48:05
Oh bah heureuse de te raviver de bons souvenirs, alors ! Je ne savais pas que tu l'avais lu, héhé. Du coup, je présume que tu as bien aimé aussi. ^^
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10/2/2020 16:27:19
ça c'est de la chronique qui vend parfaitement bien le livre ! Je verrais si je me penche dessus à l'occasion. Contente de voir que le ton différent de ce que tu attendais n'ait pas été un frein à ta lecture
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11/2/2020 00:48:51
On va dire que ça m'a perturbé au début, mais on s'y fait vite ! Puis la maison d'édition publie beaucoup de romans sur ce ton-là, donc ça ne m'a pas plus étonnée que ça au final. Il est vraiment très bien construit !
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lheuredelire
10/2/2020 17:34:52
Effectivement, tu le vends très bien ! tu sais donner envie ^^
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11/2/2020 00:50:05
Et dire que je croyais ma chronique nulle de chez nulle. ^^ J'espère que tu l'apprécieras si un jour tu décides de l'essayer.
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Vampilou
10/2/2020 18:05:19
Je suis très heureuse de voir que tu aies pris autant de plaisir avec ce roman ma belle, je l'avais adoré !
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11/2/2020 00:50:34
Oh génial, tu l'as lu aussi ! :D Oui, il était vachement cool.
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